Le chef Franck Pelux fait confiance à son destin ()
Promu de l’année du «Gault&Millau», le cuisinier de la Table du Palace n’a jamais eu de plan de carrière, c’est pour ça qu’il a réussi. Portrait.
(Photo A.Demierre/Lausanne Palace)
Il faut attraper Franck Pelux, pris dans un horaire survitaminé mais, une fois assis sur un fauteuil de sa Table du Palace, le chef se montre ouvert et disponible.
Le mois de décembre est un gros moment de l’année, et il vient de rentrer de Vals (GR), où il a été nommé Promu de l’année par le guide «Gault&Millau» 2022, avec 17/20. Une belle distinction pour ce chef de 33 ans, arrivé à Lausanne en 2020 pour succéder à Edgard Bovier.
Il en prend acte avec reconnaissance, comme il l’a fait pour toutes les étapes d’une carrière presque sans faute, au milieu de chefs étoilés.
Devenu célèbre par sa participation à «Top Chef», édition 2018, où il a perdu en finale, le Bourguignon a l’action dans les gènes familiaux. Les Pelux étaient imprimeurs de père en fils.
Mais sa mère, Rabia, d’origine algérienne, travaillait dans le restaurant de sa famille à Autun, Aux Champs Fleuris, dont la cuisine était tenue par son frère. Au décès de celui-ci, Rabia a repris l’affaire, cherché des chefs.
Puis elle s’est mise elle-même aux fourneaux, après avoir fait des stages chez Lameloise, Loiseau ou Meneau, les étoilés bourguignons. «Elle n’arrêtait pas de se perfectionner, elle a atteint un sacré niveau», affirme Franck, qui a fait son apprentissage dans sa cuisine.
Apprendre, toujours
C’est sans doute d’elle que Franck tient aussi cet optimisme, cette foi dans le destin qui a guidé sa progression.
«Avec Sarah, ma compagne, on n’a jamais cherché de travail, les opportunités se sont présentées. On en a refusé beaucoup, on a suivi les autres, parfois par inconscience et par naïveté. Mais toutes nous ont beaucoup appris.»
Sarah Benahmed, qui dirige la salle du restaurant, est depuis douze ans la complice de toutes ces aventures. Depuis qu’ils se sont retrouvés en 2009, ils ne se sont plus quittés, professionnellement ou amoureusement. «On vit ensemble chaque heure de chaque jour. Sauf les deux mois où je suis rentré de Pékin pour tourner le concours.»
Franck et Sarah, complices inséparables. (Photo A.Demierre/Lausanne Palace)
«On a besoin l’un de l’autre pour atteindre notre équilibre, explique la jeune femme. Et on croit beaucoup au destin.» Après douze ans, ils sont toujours aussi amoureux et fusionnels.
«Chaque matin, je remercie le Ciel et la vie d’avoir mis dans mon existence un homme extraordinaire. Il aime les défis, il réussit à fond tout ce qu’il touche, il est fort, c’est mon héros, avec sa capacité à s’adapter à tout ce qu’il rencontre.»
Le jeune chef a un parcours qui l’a vu passer chez Laurent Peugeot, Arnaud Donckele ou Yannick Alleno avant de croiser les cuisiniers stars lors de l’émission de M6.
«Nous avions un œil assez critique sur l’émission. Ils m’ont contacté, j’ai refusé, ils m’ont relancé. J’en ai parlé à Sarah, peu enthousiaste, mais qui m’a dit: tu y vas, mais tu vas jusqu’au bout.»
Confiance mutuelle
Ça marche comme ça entre les deux: ils se parlent, ils s’écoutent et ils font confiance à l’autre.
«Notre passage à Pékin, c’est Sarah qui en avait envie, elle qui voyait toujours plus de clientèle chinoise au restaurant. Au final, cela a été l’expérience la plus difficile que nous avons vécue. Un cadre extrêmement strict, des horaires de fous, six ou sept jours par semaine, des collaborateurs peu motivés. C’était l’usine. Mais nous en sommes ressortis plus forts.»
Le couple avait déjà fait une année à Singapour pour ouvrir le restaurant de Laurent Peugeot. «On était tellement jeunes, j’avais 23 ans, Sarah 20, et nous devenions patrons. Je ne savais même pas où placer Singapour sur la carte. Je n’ai pas de regret, mais je n’étais pas prêt.»
Après quelques saisons chez Donckele et Alleno, le couple, en 2015, était davantage à la hauteur pour ce Temple Restaurant Beijing qu’il a mené à la première place des restaurants chinois de TripAdvisor. Mais rentrer en France pour «Top Chef» était une belle porte de sortie.
«Ce concours était incroyable, nous avions une telle camaraderie. Et je rencontrais tous les chefs qui m’avaient fait fantasmer. Enfin, je n’aurais jamais imaginé avoir une telle reconnaissance publique et professionnelle ensuite. C’est vraiment le plus grand concours télévisuel du monde.»
Son seul regret: pendant les deux mois entre le tournage et la finale, il a été tellement pris par son restaurant pékinois qu’il ne s’est pas préparé. «Je le referais différemment aujourd’hui.»
Yannick Alleno, qui le suit régulièrement, l’appelle alors pour lui proposer de reprendre le mythique Crocodile de Strasbourg. Sarah n’était pas chaude: c’est le «Norrrrrd».
Mais le couple tombe amoureux de la capitale alsacienne, de sa douceur. Il déchante pourtant assez rapidement, l’ancien propriétaire ne tenant aucune de ses promesses de rénovation de l’institution qui tombe en ruines. Les voilà donc contactés par le Lausanne Palace, le charme opère. «On adore Lausanne, les clients sont incroyables de gentillesse, de reconnaissance, de bienveillance.»
Du temps pour soi
Les deux bosseurs vont un peu changer de rythme en 2022, n’ouvrant plus que quatre jours par semaine, pour mieux travailler.
«On s’en veut parfois de donner tellement à nos clients et pas assez à ceux qu’on aime, à notre famille.» Ils auront ainsi plus de temps pour courir ou pour ces randonnées en nature qu’ils adorent. Pour le cinéma aussi: Franck est fan de Tarantino, d’Eastwood ou de Guillaume Canet. Et un de leurs objectifs est bien, un jour, de fonder une famille.
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