Le show d’hiver de l’endive vaudoise ()

légume,produit,vaudL’ancienne reine des mois froids veut retrouver son trône en se diversifiant, alors que paraît un livre à sa gloire avec de nombreuses recettes.

Au Domaine des Loveresses, à Yens, au-dessus de Morges, l’endive fait souffler le chaud et le froid. On est ici dans une des quatre forceries vaudoises qui produisent ce légume à la robe virginale. Pour tout comprendre de son parcours compliqué, il suffit de lire le petit livre de Sophie Vallotton qui vient de paraître (lire ci-dessous). Ou d’écouter les explications de Philippe Cornu, le patron des Loveresses, et de son responsable technique, Philippe Vauthier, en place depuis trente-quatre ans.

Travail en deux phases

L’endive, «c’est comme le vin, affirme Philippe Cornu. Il y a la culture, d’abord, puis le travail en cave. Les deux sont importants. Et les deux demandent beaucoup de manutention.» Le producteur travaille avec 17 agriculteurs pour la première partie, la production des racines, sur environ 70 hectares. Dès avril, c’est son équipe qui va planter les graines chez eux, afin de choisir les différentes variétés dont il aura besoin en hiver, la densité de plantation, etc. Ensuite, les paysans s’occuperont des plantes qui vont développer leur racine, gage d’une future belle endive puisqu’elle en contient déjà tous les éléments. Au moment de l’arrachage, dès mi-septembre pour les précoces jusqu’à novembre pour les tardives, les machines tournent pour amener les racines jusqu’à Yens. «Cette année, avec l’automne pluvieux, c’est difficile. On a encore un quart de nos racines en terre, et je ne sais pas quand on pourra les arracher, vu la météo. Certaines années, on a dû attendre janvier, mais les plantes souffrent beaucoup et perdent de l’énergie à lutter contre le gel», explique le producteur.

Place à la cave

Une fois les futures endives arrivées à Yens, le travail commence pour les équipes de Philippe Vauthier, qui comptent jusqu’à 45 personnes en hiver, tellement il y a de manutention. Les racines sont d’abord nettoyées, calibrées avant d’être mises en chambre froide (-1 °C) pendant dix jours au minimum. «On pourrait les laisser dix mois aussi, sourit Philippe Cornu. Le but est de simuler l’hiver, pour que la plante cesse son cycle.» Puis, selon les demandes du marché, les plantes sont sorties, calibrées, mises en grands bacs avant de partir en cave obscure. Là, simplement grâce à l’eau à 20 °C qui gorge son pied, l’endive croît en 21 jours chrono, le noir favorisant leur robe blanche. Dans le grand ballet de transpalettes qui déplacent les bacs, place maintenant aux machines qui vont leur couper les pieds. Les ouvriers placent sans regarder les plantes sur une grande roue crantée avant le passage du couteau. 40 endives à la minute! Puis les ouvrières nettoient les feuilles, pèsent et mettent en sachets. Un ballet affolant de vitesse pour sortir plus de 10 tonnes par jour.

«La saison commence en général au Comptoir Suisse et au week-end du Jeûne. La génération des plus de 40 ans apprécie l’endive à la saison froide. On voit tout de suite chuter les ventes si on a un week-end chaud pendant l’hiver. Après le pic de Noël, cela redescend jusqu’à mi-mars», explique Philippe Cornu. Aujourd’hui, on trouve aussi de l’endive l’été. «Là, ce sont des jeunes qui la consomment en fraîcheur pour une salade.» Celle qui était la reine de l’hiver il y a quelques décennies avec 30 000 tonnes annuelles n’en vend plus que 12 000 tonnes, à cause de tous ces légumes qu’on trouve désormais en toute saison. «C’est bien dommage, affirme Sophie Vallotton. Voici un produit suisse, excellent diététiquement, pas cher et qui offre de multiples usages autres que la salade ou les endives au jambon!»

UN LIVRE AUX MULTIPLES RECETTES

Sophie Vallotton connaît l’endive sur le bout des doigts. Pas étonnant, puisqu’elle s’occupe du marketing des quatre forceries vaudoises. Autant dire que son petit ouvrage parle du légume avec beaucoup d’autorité. Mais le plus important reste les recettes. Certaines sont plus anciennes, mais l’auteure en a concocté elle-même quelques-unes, comme elle a demandé à plusieurs restaurateurs d’imaginer des plats autour du chicon. Y compris au Myo, japonais à Lausanne, et à l’Orchidée, vietnamien à Lausanne aussi, qui amènent beaucoup d’exotisme dans le légume qui s’intègre bien à leur cuisine. Enfin, quelques vignerons et bars à vins conseillent des crus pour chaque recette.

L’endive, délicieuse et savoureuse, chaude et froide, de Sophie Vallotton, Cabedita, 80 p, 20 fr.

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