La rhubarbe aime le Vully ()

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C’est une vieille tradition menacée: la plante acidulée aime les terrains aérés de la région. Et crac, on casse la tige. Et crac, un coup de couteau pour nettoyer le pied. Et crac, un autre pour couper la feuille. Trois gestes répétés à l’infini pour récolter les bâtons de rhubarbe, d’avril à mi-juin. Alexandre Javet et ses ouvriers polonais font dans le répétitif sur les coteaux du Mont-Vully mais ils poursuivent une vieille tradition de cette région entre les lacs de Neuchâtel et de Morat.

Depuis «toujours», la rhubarbe a pris ses aises dans le Vully. «Chacun en avait dans un coin de potager ou une petite parcelle», explique Alexandre Javet, président de l’Association de producteurs de légumes du Vully. (Oui, la rhubarbe est un légume.) «Elle a trouvé ici un terroir qui lui convenait, avec une terre légère et des bonnes expositions au soleil.»

La tradition en a pourtant pris un coup. Les quelques bâtons qu’on pouvait vendre comme à-côtés à l’époque doivent aujourd’hui porter des labels, des garanties qui sont trop compliquées pour une petite exploitation. Certains producteurs sont partis à la retraite ou ont négligé leurs plantations. Ne reste donc qu’une demi-douzaine de professionnels, qui produisent le quart de la consommation nationale. Et un seul des trois grossistes subsiste dans la région.

Alexandre Javet est le plus important producteur, avec ses 100 tonnes annuelles. Il rêverait d’une AOC pour son produit phare. «On a mis un peu moins d’énergie sur la promotion», explique-t-il, parce que le Vully n’arrive plus à suivre la demande suisse. La Thurgovie s’y est mise et ne cesse de progresser. Mais la région des lacs a l’avantage de la précocité, qui lui permet de concurrencer la rhubarbe importée dès début avril. Une période où le prix est trois fois plus élevé qu’en juin, ce qui est tout bénéfice pour le maraîcher.

«La rhubarbe est très écologique, comme plante», poursuit le producteur. Il n’y a en effet aucun traitement phytosanitaire à effectuer. Par contre, le légume demande beaucoup de soins manuels. Entre la récolte (60 kg par heure pour un ouvrier) et les trois sarclages annuels pour éliminer les mauvaises herbes, il ne faut pas trop compter ses heures.

Plutôt résistante, la plante peut durer une douzaine d’années. Si on ne récolte rien la première, on peut espérer jusqu’à deux récoltes les années suivantes. Il faudra ensuite laisser la plante au repos pour qu’elle reprenne des forces pour le printemps prochain. Surtout que les consommateurs deviennent pénibles. Ils veulent des bâtons bien rouges, plutôt épais (environ 3  m) et assez longs. Et, comme on le sait, le consommateur a toujours raison…

Une Chinoise

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