Le GaultMillau 2012 distingue deux jeunes chefs vaudois ()

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La Cuisinière de l’année est Maryline Nozahic, à Cheseaux- Noréaz, et le Petit Manoir, à Morges, est la Découverte 2012

Comme chaque année, le guide GaultMillau annonce la sortie de sa nouvelle édition en distribuant quelques prix. Hier, on se pressait donc au restaurant Adelboden, à Steinen (SZ), pour déguster les plats de Franz Wiget, Cuisinier de l’année, noté 18 (lire ci-dessous). Mais c’est du côté de Cheseaux-Noréaz, près d’Yverdon, dans un bâtiment communal décoré de façon moderne à l’enseigne de la Table de Mary, que se trouve la Cuisinière de l’année, Maryline Nozahic, un titre rarement attribué par le guide.

Il y a six ans, cette jeune femme avait déjà été sacrée Découverte de l’année par le même guide, alors qu’elle attirait les gourmands dans son ancien restaurant perdu à Vugelles-La Mothe. «C’est toujours une surprise, évidemment», assurait celle qui travaille avec la complicité de son mari, Loïc, en salle. «Je me pose toujours la question: «Est-ce que je le mérite?» Je ne me sens pas aussi douée que certains cuisiniers que je vois autour de moi.»

Sans fausse modestie, avec ce franc-parler qui est le sien, la jeune cheffe sait déjà ce qui l’attend pour l’avoir vécu à Vugelles: «On a été complet pendant six mois, c’était de la folie. Je pense qu’ici aussi, dès aujourd’hui, le téléphone va sonner, sonner. Ça tombe sur une période où les réservations marchent déjà bien», s’amuse-t-elle. Et d’ajouter: «Même si nous allons être surchargés, nous sommes très contents d’avoir été récompensés!»

La cuisine de Mary est légère, moderne, colorée, épicée et ouverte au monde. Elle n’a pas oublié ses origines, a puisé l’amour des poissons auprès de son mari breton, et mélange avec beaucoup d’élégance des produits parfois rustiques à des épices d’ailleurs. «On ne va rien changer à ce que nous sommes, à ce qui fait notre style.» Et elle va toujours garder du temps pour leur fille, Léa, 8 ans.

Tout frais

A Morges, le Petit Manoir est devenu un petit hôtel qui appartient au groupe Boas, spécialisé dans la gestion d’EMS. En lançant un restaurant le 11 mai de cette année, la direction a fait fort, puisque son chef, Julien Retler, décroche cinq mois plus tard le titre de Découverte romande. Il faut dire que le garçon a un beau parcours: après un apprentissage dans un une-étoile alsacien, il passe par Les Crayères, à Reims, avant de venir en Suisse chez Philippe Chevrier, Georges Wenger et Gérard Rabaey!

Dans ce manoir élégamment restauré, la salle n’est pas très grande et la terrasse ouvre sur le jardin. Le jeune chef (32 ans) ne travaille en cuisine qu’avec une seule personne: «A deux, forcément, on fait des choses simples. Mais ça tombe bien: je suis très orienté sur le produit. Si vous commandez du faux-filet, vous voulez du faux-filet, pas une masse de garnitures.» Ses produits sont de belle qualité, dans une préparation classique qui les met en valeur.

Un cuisinier de l'année en Suisse centrale

Après des cuisiniers de château (Andreas Caminada) ou de palaces (Peter Knogl ou Dominique Gauthier), place au terroir. C’est le propriétaire d’une auberge de campagne discrète, sur la route qui relie Zurich au Tessin, qui a été nommé Cuisinier de l’année. Franz Wiget règne sur l’Adelboden, à Steinen, juste à côté de Schwytz, et il y garde de solides liens avec les producteurs alentour, depuis le boucher du Muotathal jusqu’à la pêcheuse du lac de Zoug. Ce qui ne l’empêche pas de mélanger leurs produits avec d’autres plus luxueux. Un ensemble sympathique servi dans un décor de chalet avec une vue splendide sur la vallée. Mais qui, à nos yeux, ne justifie pas ce titre prestigieux, alors que, par exemple, Carlo Crisci à Cossonay est toujours à 18 malgré un texte dithyrambique cette année. Comprenne qui pourra.

Un promu en Valais

Le promu de l'année est Damien Germanier, qui tient le Botza, à Vétroz (VS), et qui passe à 16 points. Une progression régulière pour cet ancien de chez De Courten et Rabaey puisqu'il gagne un point chaque année depuis qu'il a ouvert son coquet restaurant situé dans la zone industrielle du village valaisan. Une cuisine généreuse, intelligente et précise, proposée à prix d'ami dans des menus, avec ou sans vins. Et la carte compte tout ce qui... compte dans le Vieux-Pays.

Une profession inquiète

La gastronomie n’est pas une science exacte, et il n’est jamais facile d’obtenir des restaurateurs des tendances précises sur leur chiffre d’affaires. C’est pourtant l’un de leurs premiers sujets de discussion quand ils se retrouvent. Un constat les réunit: il est devenu impossible de prévoir aujourd’hui la fréquentation à venir. «Les gens réservent de plus en plus tard», explique par exemple Damien Germanier. «Vous pouvez être complet un mardi soir et n’avoir que deux tables le vendredi, il n’y a plus de logique, c’est à n’y rien comprendre», avancent certains chefs interrogés.

«Et les clients font davantage attention, commandent des vins moins chers ou des demi-bouteilles» est une explication qui revient souvent. Certains voient aussi une baisse de fréquentation la troisième semaine du mois, avant que le salaire tombe. «Les gens sortent peut-être moins, mais ils sortent mieux, se font des vrais plaisirs», affirme Mary Nozahic. De manière générale, <br/>la branche semble sourire davantage en Suisse romande qu’en Suisse alémanique.

Il y en a au moins un qui rigole: la nouvelle star des Grisons, Andreas Caminada, est complet huit mois à l’avance dans son minuscule trois-étoiles.

Festival vaudois

Le canton de Vaud est particulièrement en valeur dans cette édition puisque quatorze restaurants gagnent un point ou plus contre trois qui régressent. Et dix-sept tables font leur apparition contre sept qui disparaissent. Revue des effectifs.

Ceux qui gagnent un point: le Jorat, à Mézières, et la Veveyse, à Saint-Légier, passent à 16. Le Chasseur, à Essertines-sur-Rolle, reçoit 15. Le Chasseur d’Allaman, les Bains d’Avenches, l’Ecusson vaudois de Bretonnières, la Clef d’or de Bursinel, le Cinq de Lausanne, le Mont-Blanc de Lonay et le Prieuré de Pully obtiennent un 14e point. Enfin, le Baron Tavernier de Chexbres, l’Eléphant Blanc et l’Obeirut de Lausanne et la Station des Sens de Vevey grimpent à 13. On peut leur ajouter le Trianon du Mirador du Mont-Pèlerin et les Saisons du Grand Hôtel du Lac de Vevey, qui passent les deux à 15 points, alors qu’ils étaient sans note l’an dernier, pour cause de changement de chef.

Ceux qui arrivent: outre le Petit Manoir de Morges, le Café Suisse de Bex, le Tawan-Thaï de Cossonay, les Mousquines, la Bavaria, le Tramway et le Tom Yam de Lausanne, le Château de Nyon et le Schloss Salavaux, de Salavaux, tous avec une note de 13. Et La Pinte du Paradis d’Aigle, la Grenade d’Aubonne, Aux Trois Petits Points et l’Indochine de Lausanne, le Belmont de Belmont, le Marché de Nyon et la Gare de Grandvaux, tous avec 12 points.

Ceux qui perdent un point: Les Platanes de Chéserex, le Tribeca de Lausanne et la Prairie d’Yverdon-les-Bains passent de 13 à 12.

Ceux qui disparaissent: l’Etoile de La Rippe, l’Esplanade d’Aubonne (nouveau chef), Le Maure d’Avenches (fermeture), le Mont-Blanc de Morges, le Grand Café de l’Hôtel Real de Nyon, la Treille de Penthaz (changement de patron), le Débarcadère de Saint-Sulpice.

Succession: enfin, parmi les changements, la note attendue du successeur de Gérard Rabaey au Pont de Brent: Stéphane Décotterd obtient un 18 pour sa première année. «Le Pont de Brent reste fidèle à sa tradition d’excellence», écrit le guide, qui rappelle que les 19 points ne sont pas héréditaires.

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