Marier vin et chocolat est tendance mais… ()

vin_choco_39.JPGDepuis mai, le Caveau de Romainmôtier et ses neuf vignerons des Côtes-de-l’Orbe proposent une dégustation mariant leurs vins aux carrés de chocolat de Passionnément chocolat, à Yverdon-les-Bains. Selon les formules, chacun choisit entre quatre et vingt saveurs cacaotées, puis tente de les marier aux crus du vigneron présent ce jour-là. «Il fallait se démarquer des autres caveaux», explique Alexandre Truffer, le responsable de Roman du Vin qui a proposé le concept aux vignerons. «Aujourd’hui, ces dégustations représentent 20% du chiffre d’affaires et attirent une nouvelle clientèle.»

Le pari est osé, d’autant que, le vigneron changeant chaque week-end, il s’agit d’accorder des vins différents à chaque fois. «Nous avons voulu laisser les gens trouver eux-mêmes leurs mariages, poursuit Alexandre Truffer, même s’ils peuvent obtenir des conseils sur place.» Le journaliste organise également des soirées guidées à l’extérieur du caveau. Pour lui, il est plus facile de marier des blancs que des rouges suisses. «Mais chacun a son avis, c’est très personnel.» Son coup de cœur? Un carré au poivre avec un Plant-Robert des Côtes-de-l’Orbe, dont le côté poivré multiplie la puissance de l’épice.

A Mont-sur-Rolle, le caveau a aussi organisé des dégustations en collaboration avec le confiseur rollois Christophe Moret, et prévoit de refaire l’expérience en 2010. Pour Yves Blondel, le président du caveau, «l’expérience est vraiment intéressante. Mais on a dû beaucoup travailler avec Christophe Moret pour trouver des accords avec nos vins, tester des dizaines de chocolats.» Pour lui, l’accord entre un palet au thé Lady Grey et un chasselas était parfait et, dans les rouges, seuls des vins tanniques supportent l’amertume du cacao.

A Montreux, Johann Klauembesch, d’Au cœur du chocolat, propose lui aussi des mariages entre les chocolats qu’il vend et des vins du Valais, de la malvoisie flétrie pour des truffes au vin doux jusqu’à la syrah pour un chocolat au grué et café. Il voudrait maintenant également travailler avec les alcools, en partenariat avec von Fass.

Blaise Poyet, confiseur à Vevey, prône, lui, la pureté. Dans ses dégustations pour groupe, il fait d’abord découvrir les chocolats millésimés, exclusivement criollo, avant de proposer des accords. «On ne part que sur des pâtes de cacao et on demande aux gens ce qui leur fait plaisir. C’est ça, l’important. Mais il ne faut surtout pas imaginer marier des bonbons épicés avec des vins. C’est trop compliqué.» Oui, mais l’amertume du cacao? «Quelle amertume? Ceux qui disent ça ne connaissent pas le chocolat. Il peut y avoir des pointes d’amertume ou d’acidité dans des bons chocolats, mais pas de réelle amertume!»

Le muté, rien que le muté!

Pour des dégustateurs affirmés, pourtant, seuls des vins rouges mutés (type porto) peuvent supporter le cacao. Notre collaborateur Pierre Thomas, associé du Bar à vin le Midi 20, à Lausanne, en est convaincu: «Le monde des mutés est impressionnant et permet de belles variations.» Le Midi 20 avait organisé six soirées de dégustations qui avaient bien marché et va réitérer l’expérience cet automne. «Il faut oublier les blancs. Et les rouges secs ne supportent pas l’amertume du cacao. Alors que le côté épicé des vins rouges mutés renverse la tendance.» Il proposait un vin de la région de Valence, un ou deux italiens. «Mais on peut aussi imaginer des Banyuls ou des portos. Sinon, l’accord vin-chocolat est très compliqué, à la limite de l’impossible. Ou alors, il faut prendre des truffes faibles en cacao, ce qui en diminue l’intérêt.»

Le vigneron Alain Emery, à Aigle, a passé un partenariat avec le chocolatier aiglon Hedinger pour vendre des grands crus de chocolat avec son Gama Doux, un gamaret muté, «une formule qui marche bien».

Michèle Diserens, qui organise les dégustations de la maison Bolle, à Morges, en est également convaincue, elle qui avait monté plusieurs soirées sur ce thème avec le chocolatier Boillat, de Saint-Prex: «Le vin muté, c’est ce qu’il y a de mieux. Nous avions travaillé sur toute la gamme des mutés du Mas Amiel. Cela ouvre une palette d’arômes formidable.» Pour elle, il faut également faire attention car la dégustation des chocolats amène vite à une saturation. Si elle peut encore imaginer un blanc aromatique avec un chocolat un peu épicé, l’association avec un chasselas ou un rouge tranquille est inimaginable.

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