Ce week-end, l’ovin va trôner sur de nombreuses tables romandes. Mais d’où vient-il et à quoi faire attention?
«D’habitude, on fait 70 agneaux suisses par semaine, mais là, avec Pâques, on dépasse les 120 bêtes. Et, à côté, il y a toute l’importation.» Joël Suter est le responsable romand de Mérat, qui fournit en viande 920 restaurants dans la région depuis ses bases de Vucherens et de Martigny (VS). Ce spécialiste du secteur gastronomie défend avec vigueur les produits suisses, qu’il s’agisse de bœuf, de porc ou d’agneau. «Même si, dans ce dernier cas, cela ne représente qu’un quart de nos ventes. Le marché suisse est tellement petit.»
A la tête de l’entreprise qui appartient à Migros et qui emploie 45 personnes, Joël Suter a la chance d’avoir de la quantité pour faire son choix: ses acheteurs et lui ne prennent que le meilleur dans la viande abattue par le géant orange. «En Suisse, sur quinze agneaux abattus, cinq ou six sont assez beaux pour mes critères.» Soit une viande suffisamment charnue, avec un gras bien réparti. «C’est quand même le gras qui apporte le goût à la viande. Même sur l’agneau, qui est plutôt maigre, il en faut un peu.» Mais attention, on ne parle pas ici de ce qui retient souvent les gens, «ce goût de mouton» qu’on associe à tort à l’agneau. «Tout ce qui est trop fort, comme les brebis, ça finit en merguez ou en salami.»
Et quelle race est la meilleure? «Franchement, en Suisse, nous avons de très bons résultats avec le croisement de blanc des Alpes et de charolais. Cela donne une viande d’excellente qualité et des agneaux pas trop gros lors de la mise bas. En plus, ils conviennent très bien à nos pâturages. Mais, dans le fond, la meilleure des races, si elle n’est pas élevée correctement, ne va pas donner une belle viande. Je préfère me fier au producteur qu’à la race.»
En Suisse, Benzoni Frères, à Aubonne, concentre l’essentiel des agneaux suisses avant abattage. Ces derniers ont de 9 à 12 mois, alors que les agneaux de lait, présents seulement à Pâques, n’ont que 6 à 9 semaines. «Chez ceux-ci, la viande est tendre, bien sûr, mais presque un peu doucereuse à cause de leur alimentation», explique Joël Suter. Lui préférera un agneau. Et il craque pour l’épaule. «Sur l’agneau, les pattes avant travaillent davantage que les arrière. L’épaule est donc plus musclée que le gigot, plus riche en collagène qui lui donne du goût. Farcie, cuite tout doucement, c’est un régal.»
Les importés
«Bien sûr, on importe aussi de belles choses, par exemple de Sisteron. Mais parce que là-bas ils trient les meilleures bêtes pour la Suisse, qui est dure en affaire. Même chose en Nouvelle-Zélande ou en Australie, qui nous fournissent de belles pièces fraîches, mais pas aussi rouges que les viandes locales, un peu moins enveloppées. On en reçoit aussi du Royaume-Uni ou du Chili. Tout ça, écologiquement, n’est pas idéal. Et on ne sait pas toujours si les bêtes ne sont pas trop stressées au moment de l’abattage, ce qui est terrible pour elles, mais aussi pour la qualité de la viande, qui devient dure.»
La recette
1 épaule d’agneau désossée de 2 kg, 300 g de chair à saucisse, 2 œufs, 1 oignon, 3 gousses d’ail, 25 g de raisins secs, 25 g de pignons, 2 cc de marjolaine et 2 cc de coriandre hachée, sel et poivre, 3 branches de thym.
Hachez l’oignon, pressez l’ail, puis mélangez-les avec la chair à saucisse, les raisins, les pignons, la marjolaine et la coriandre.
Disposez la farce au centre de l’épaule, reconstituez-la puis ficelez-la (ou emballez-la dans une crépinette). Salez, poivrez.
Faites-la dorer dans une poêle avec un peu d’huile d’olive puis mettez-la au four avec les branches de thym, à 120 °C pendant quatre heures. Arrosez au besoin d’un peu de bouillon.