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Thibaut Panas: dans la cave, de la lumière plein les yeux

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vin,portrait,lausanne,beau-rivagePortrait réalisé dans le cadre des dernières pages de 24 heures le 25 novembre, à l'occasion de son titre de sommelier de l'année GaultMillau. (photo: Odile Meylan)

Dans sa carrière, tout est allé très vite, encore plus vite que son phrasé, rapide, précis, maîtrisé. Diriger avant 30 ans la cave et les cartes de vins du Beau Rivage Palace, à Lausanne, 75 000 flacons à gérer, c’est exceptionnel. Et recevoir le titre de «sommelier de l’année 2013» du guide GaultMillau alors qu’on n’a pas encore soufflé ses 30 bougies, c’est tout aussi exceptionnel. Thibaut Panas s’en émeut, pense à sa maman restée à Troyes pour qui il collectionne les coupures de presse le concernant, et réalise combien la chance l’a aidé.

Lui qui est né en «Champagne pouilleuse» (celle qui entoure les vignobles prestigieux sans en posséder), dans une famille qui aimait la gastronomie et les vins, a toujours eu du nez, celui qui lui faisait reconnaître les parfums dans la rue, avec une faiblesse pour Trésor de Lancôme. A 15 ans, ses rapports avec l’école sont distendus et il s’oriente vers l’hôtellerie, le service. «J’aurais pu être parfumeur, mais il m’aurait manqué le contact avec les gens, j’adore ça.» Les contacts, ce sont aussi les rencontres qui l’ont marqué, comme celle d’Yves Chapier, président de l’Association des sommeliers de Champagne, qui sera son maître de stage au Trianon, à Epernay, où il effectue sa Mention en sommellerie.

Le jeune Champenois est un vrai passionné. Si l’école n’était pas sa tasse de thé (!), l’étude du vin le transcende. Le nez, ce nez de parfumeur, il le met continuellement dans les livres, pour étudier, dans les verres, pour déguster. L’objet de son métier, c’est un univers si large, si changeant. «Yves Chapier me disait toujours que si tu dégustes le même vin un jour en écoutant Mozart, le lendemain avec de la musique punk, tu auras bu deux choses totalement différentes.» S’il peut déguster seul, il ne peut boire qu’en compagnie, car le vin est une boisson de partage. «Là aussi, la personnalité de ceux avec qui vous dégustez une belle bouteille influencera le plaisir que vous en retirerez.»

Il aime en parler, ses profonds yeux bleus plantés dans les vôtres, décrire ses crus avec des termes accessibles. «Il faut être à l’écoute du client, tenter de deviner son style en très peu de temps, c’est toute la magie du métier.» Et les aider quand on leur tend une carte qui contient plus de 1000 références. «Dans un couple, je sais que si mon vin plaît à Madame, j’ai gagné, Monsieur suivra presque toujours.»

Dans cette carrière expresse, la chance a aussi joué son rôle. Six mois après son arrivée dans son premier emploi, à Brighton, le chef sommelier du South Lodge s’en va et il se retrouve à la tête de la cave de cet hôtel de la chaîne Exclusive. «Il a fallu se débrouiller avec mon pauvre anglais. Mais quand on tombe dedans comme ça, on apprend très vite.» La chance, c’est aussi cette petite amie rencontrée en Angleterre et qui venait faire ses études à l’Ecole hôtelière de Lausanne. Il cherche une place pour la suivre et trouve… chez Philippe Rochat à Crissier. Six mois plus tard, rebelote, Christophe Monteau, le chef sommelier, s’en va. Le cuisinier lui propose le poste, avec vingt-quatre heures pour se décider. A 25 ans, le voici au cœur du mythe.

En remplaçant Tony Decarpentrie au Beau Rivage, il se retrouve à la tête d’une des plus belles caves de Suisse. «Cet été, j’étais sur le lac en bateau et j’ai regardé l’hôtel. Quand on est sur terre, on ne voit pas bien quel monument extraordinaire c’est. Et là, je me disais: «Tu te rends compte que tu en es le chef sommelier?»

Aujourd’hui, le Champenois retourne souvent sur sa terre natale, vers sa mère qui «est tout pour moi… après le vin», mais la distance a resserré le cercle d’amis. Il a retrouvé une deuxième famille dans le personnel du palace d’Ouchy, «tellement chaleureux». Il parle de l’extraordinaire confiance qu’on lui fait et s’en épate toujours, avec cette sincérité, cette gentillesse, cette attention qui semblent le porter.

Avec le temps, il préfère des vins épurés, des blancs tendus, frais et vifs, nés sur un sol calcaire et dans lesquels on ne sent pas le bois, des rouges monocépages, des pinots noirs, des syrahs ou des cabernets francs. «On a une telle chance ici, on a une variété de cépages, de terroirs, de mentalités, de cantons.» Il dit «on» parce qu’il se sent Suisse, Vaudois même. «Je me vois mal partir d’ici, je me sens tellement bien dans ce coin.» Ce forcené de ski aime surtout la relation qu’il a avec les chefs, pour construire de beaux mariages, par exemple avec la brigade d’Anne-Sophie Pic. Mais aussi comme le menu qu’il a concocté avec Yves Guillas, le chef de l’Accademia, autour des vins toscans de Rocca di Montegrossi, ce jeudi soir. (Lausanne, pl. du Port 11, Rest. Accademia. Jeudi 28 dès 18 h, 98 fr. 021 613 34 34.)

Carte d'identité

1984 Naît le 23 septembre à Troyes (F).

2004 Après son bac professionnel, fait une Mention sommellerie au Trianon, à Epernay, la résidence de Moët & Chandon.

2005 Devient commis sommelier au South Lodge de Brighton.

2007 Intègre l’équipe de dix sommeliers du Manoir aux Quat’Saisons, près d’Oxford.

2009 Suit en Suisse son amie étudiante à l’EHL et devient sommelier à Crissier.

2012 Devient chef sommelier du Beau Rivage Palace, à Lausanne

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