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Le servagnin est un alerte sixcentenaire

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La légende prétend que le servagnin a été donné à Morges par Marie de Bourgogne en 1420. Mais le six-centième anniversaire tombé en pleine pandémie ne se fête que cette année. L'occasion de voir si les vins issus de ce clone de pinot noir tiennent le temps.

L'histoire

On ne dira jamais assez combien le mythe est utile à la promotion des vins. Ainsi de ce servagnin que les Vins de Morges font remonter à 1420, quand Marie de Bourgogne, épouse du duc de Savoie, aurait donné de précieux plants de son pinot noir bourguignon aux vignerons de la Coquette, pinot noir que son père, Philippe le Hardi, avait imposé exclusivement en Côte d'Or. Dans les écrits, elle parle de son "cher servagnin". Qui serait devenu salvagnin, sauvignin ou servignier dans l'histoire vaudoise. Ou salvagnin de Saint-Prex.

Mais est-ce bien ce clone de pinot noir qu'a retrouvé le Saint-Preyard Pierre-Alain Tardy dès 1963? Ces trois plants sauvés par Werner Kaiser devant son poulailler, repérés par le vigneron quelques années plus tard - et multipliés - donnent un vin terne, acide et pâle. Appelé à le vinifier, Raoul Cruchon lui trouve quand même quelques qualités, et il tente d'en planter sur d'autres terroirs dès 1990. Les résultats sont "au-delà de nos espérances", affirme-t-il.

Le président des Vins de Morges y voit un porte-étendard. Le nom Servagnin est déposé, un règlement strict est élaboré, imposant ce clone-là, une limitation des rendements à 50 hl/ha (environ 700 g/m2), un élevage en fûts de chêne de neuf mois minimum, et une mise en marché au 1er avril de la deuxième année. Baptisé au millésime 2000, le servagnin est produit par une petite vingtaine de vignerons de la région. Cinq hectares ou 30'000 bouteilles sous ce nom-là, cinq autres hectares entrant dans des assemblages ou des vins parcellaires, comme le célèbre Raissenaz des Cruchon, par exemple.

L'anniversaire

Prévu pour 2020, le six-centième a dû attendre la fin de la pandémie. Au menu, une dégustation et un repas de gala le 28 mars, une présence à Divinum, au Tour de Romandie, à la Fête de la tulipe de Morges, à la Nuit des épouvantails avant la Nuit du servagnin le 4 novembre. Et une immersion de 300 bouteilles dans le Léman.

Une grande dégustation a permis de scruter le potentiel de vieillissement de ces vins, ainsi qu'un tour des 16 vins du millésime 2020. Nous en étions.

La dégustation

En remontant le temps grâce à des bouteilles conservées par différents producteurs, on se rend compte de la diversité de ce cépage, selon qu'il soit planté sur une moraine de fond, sur une molasse argileuse, où il prend de la, ou sur  richesse, du gras, ou sur une moraine de retrait, plus sableuse et silicieuse, où il trouve de l'élégance, de la finesse. L'idéal étant, évidemment, de concilier les deux.

Voici venir deux 2017, année chaude, qui le confiturent un peu, faisant craindre que, peut-être, il supportera mal le changement climatique.

En 2016, millésime difficile, il se montre plus à l'aise, comme celui des Trois-Terres, avec de la matière, du gras, des notes de tabac parfois, après une macération grappe entière.

2015, année solaire, démontre la qualité du cépage, vinifié sur la structure et l'équilibre par Raoul Cruchon, alors que son collègue du Domaine de Marcelin est beaucoup plus évolué.

2014, année catastrophique qui a vu l'apparition de la drosophyle, ne laisse pas de grands souvenirs dans deux bouteilles qui ont dû faire illusion deux ans avant de s'éteindre.

2013 montre encore beaucoup de fraîcheur, de pruneau, de griotte, avec une belle longueur et une toute petite note d'évolution.

Le 2011 de la famille Perey part sur des fruits rouges, groseille, framboise, avec encore de l'acidité. La garde se confirme. Comme dans le 2010 des Cruchon, riche, un peu cerise compotée, mais encore frais et distingué.

Remontons au 2006, année fraîche et compliquée, qui ne lui a pas trop convenu.

Et terminons en apothéose avec la dernière bouteille du 2003 des Cruchon, qui, presque vingt ans plus tard, déroule sa richesse dans des tanins de velours, des notes de pruneau sec, de tabac. Un grand vin.

Le millésime 2020

Les seize vins qui sortent cette année viennent d'un millésime où le froid et l'humidité ont fait des dégâts pendant la floraison avant un été chaud.

Mais le résultat est convaincant pour la majeure partie des échantillons, avec la fraîcheur que recherchent les consommateurs d'aujourd'hui alliée à une belle structure, assez juteuse et gourmande.

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