J'ai décidément beaucoup de chance: je faisais partie des bienheureux invités à la sortie du Quattromani 2007. Le Quattromani? Une aventure tessinoise comme on les aime. L'histoire de quatre vignerons, venant chacun d'une des régions viticoles du canton*, qui ont décidé de faire un vin en commun, un vin d'exception qui soit un peu l'ambassadeur de toute la qualité du vin tessinois. Claudio Tamborini, Angelo Delea, Guido Brivio et Feliciano Gialdi (de gauche à droite sur la photo, entourant Jean-Jacques Gauer, "testimonial" de ce millésime) produisent ensemble plus d'un tiers des vins du canton du sud des Alpes.
Les quatre compères récoltent et vinifient chacun de leur côté leur merlot. Puis ils sélectionnent leurs meilleurs crus, qu'ils dégustent ensuite ensemble avant de choisir les quatre cuvées qui seront assemblées à raison de 25% chacune. Puis un des quatre, à tour de rôle, élève le vin en barriques pendant vingt mois. Une fois mis en bouteille, le Quattromani attend encore six mois avant d'être commercialisé (environ 10 000 bouteilles en 2007). Et les quatre compères reversent chaque année un montant à une oeuvre d'utilité publique (80 000 fr. en dix ans).
Pour fêter dignement ce vin et la réouverture de la Table d'Edgard, le chef Edgard Bovier avait conçu un beau menu pour l'accompagner. Et le pari était de servir du Quattromani à des températures différentes selon les plats.
Pour le homard breton aux artichauts grillés, pousses d'herbes amères et olives Taggiasche, le Quattromani était servi à 15 degrés. Malgré la présence des artichauts, souvent mortels pour le palais du dégustateur, le merlot tenait bien le coup, avec beaucoup de fraîcheur encore.
Avec la caillette de faisan au romarin (j'en salive encore), son risotto carnaroli et sa sauce réduite au Quattromani, le vin était servi à 17 degrés. Plus de puissance déjà, une complexité qui se révélait davantage.
Avec le chevreuil au cassis, et sa ronde de légumes et fruits (ah, la betterave rouge en accompagnement de la chasse, un régal acidulé), on montait à 19 degrés pour que le merlot puisse révéler toute sa puissance. On sent que ce vin est fait pour durer, mais sa jeunesse n'est pas rédhibitoire.
Il allait fort bien également avec un choix de fromages tessinois. Mais se montrait trop fort face au dessert.
Moi qui déteste changer de vin à chaque plat (et mon foie déteste aussi), cette petite expérience était un encouragement. Tout un menu gastronomique avec un seul et même cru!
* le Mendrisiotto, le Luganese, le Locarnese et les Trois Vallées.
54 fr. la bouteille chez www.bacco.ch.